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- Le CRA Limousin présente le Dispositif d’Autorégulation
Le Dispositif d’Autorégulation (DAR)
du collège Maurice Genevoix de Couzeix (87)
- Temps de lecture : 7 min
La stratégie nationale pour l’autisme au sein des Troubles du Neuro-Développement (TND) a inscrit au cœur de son engagement n°3 la scolarisation des jeunes autistes. Ce droit à la scolarisation se matérialise grâce à une diversité de réponses et de dispositifs répondant précisément aux besoins des enfants et des adolescents. Parmi ces réponses, le déploiement des dispositifs d’autorégulation (DAR).
Implantés au Canada depuis plus de vingt ans par Stéphane Beaulne, chercheur clinicien et Professeur à l’Université de Nipissing, les DAR sont présents en France depuis 2016. En 2022, le point d’étape de la mise en œuvre de la stratégie nationale en recense 33 et pour cette rentrée scolaire 29 nouvelles ouvertures sont prévues.
A qui s’adressent ces dispositifs ? Quelles sont leurs spécificités et quels sont leurs modes opératoires ?
Avec la création du tout premier dispositif national à l’école de Saint-Germain-les-Vergnes (19), les DAR sont bien représentés sur le territoire de l’ex région Limousin (voir le recensement de ces dispositifs sur notre site). Nous avons pu observer celui porté par l’Association APF France handicap au collège Maurice Genevoix de Couzeix (87) qui accueille des élèves autistes et/ou porteurs d’autres troubles du neurodéveloppement. C’est en s’appuyant sur l’expertise de ces professionnels que le CRA Limousin souhaite répondre à ces questions.
Un projet inclusif et fédérateur
Historiquement à la pointe de l’inclusion, le collège Maurice Genevoix bénéficie de la proximité de l’Institut d’Education Motrice (IEM) de Couzeix porté par l’Association APF France handicap. Déjà doté d’Unités d’Enseignements Externalisées (UEE) et d’Unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis), l’établissement a vu son offre de scolarisation s’enrichir d’un dispositif d’autorégulation depuis la rentrée 2022.
Initialement nous aurions dû ouvrir en septembre 2021 mais la mise en place effective n’a pu se faire qu’à la rentrée suivante. Nous avons dans un premier temps accueilli trois élèves : deux en 6ème et un autre déjà scolarisé qui passait en 5ème. Cette année nous avons trois nouveaux arrivants en 6ème. Nous allons progressivement étendre notre capacité d’accueil à dix places. Nous sommes un DAR qui s’adresse aux élèves ayant un Trouble du Neuro-Développement (TND). Nous pouvons donc accueillir d’autres enfants que des autistes même si pour cette deuxième année de fonctionnement ils composent en très grande partie nos effectifs.
Amandine ORIOL (coordinatrice du pôle d’appui médico-sociale pour la scolarisation)
Pour accueillir ce public et intégrer ce nouveau dispositif, un temps de formation de l’ensemble du personnel est imposé par le cahier des charges.
Avant l’ouverture nous avons bénéficié d’une formation sur cinq jours pour laquelle l’ensemble des intervenants du collège étaient conviés, pas uniquement ceux du DAR. J’ai été très agréablement surprise car beaucoup d’entre eux étaient présents pour comprendre en quoi consistait le dispositif, comment il se différenciait des autres et quelle était sa philosophie.
Pour les professionnels détachés de l’APF, nous avons également pu compléter notre formation initiale par l’obtention d’un Certificat National d’Intervention en Autisme (CNIA), formation réalisée sur une année, nous permettant d’acquérir une vraie expertise dans l’autisme, ce qui nous sert énormément sur le dispositif.
Aude MAZAUD (éducatrice spécialisée)
L’équipe du DAR se compose de deux enseignantes d’autorégulation, de deux éducateurs à temps plein et d’une ergothérapeute qui intervient deux jours par semaine. D’autres professionnels du médico-social peuvent également être sollicités selon les besoins des élèves.
Amandine ORIOL (coordinatrice du pôle d’appui médico-sociale pour la scolarisation).
La mise en place des DAR ne peut se faire sans que l’ensemble de la communauté éducative ne soit formée et partie prenante. Une réelle émulation autour d’un travail collaboratif entre l’équipe médico-sociale et pédagogique doit avoir lieu pour coopérer et coordonner les actions au quotidien.
La diffusion progressive de l’autorégulation à l’ensemble du fonctionnement du collège
Porté par le chercheur québécois Stéphane Beaulne, l’autorégulation peut se définir comme :
“la capacité qu’à un élève de pouvoir gérer des situations, qu’elles soient sociales, émotionnelles ou cognitives, de façon autonome. Ce qui veut dire pour lui être capable de choisir, de s’engager sur le plan comportemental” (voir la vidéo explicative du concept).
Ce processus par lequel les enfants vont apprendre à maîtriser leurs pensées, leurs comportements et leurs émotions se travaille dans un espace dédié au sein de l’établissement, la salle d’autorégulation. Scolarisés dans une classe ordinaire, les élèves relevant de ce dispositif ont aussi des temps planifiés dans la salle d’autorégulation pour travailler des prérequis et être en réussite. Les séances sont individuelles ou en petits groupes. Elles se déroulent autour d’activités d’entraînements à l’autorégulation et d’anticipation sur les apprentissages et conduites à tenir dans les différents lieux de l’école (classes ordinaires, cantine, cours de récréation…).
L’aide qui est apportée par les intervenants doit générer plus d’autonomie que de dépendance. L’objectif étant de faciliter la réussite dans la classe de référence.
Les temps qui sont passés dans la salle d’autorégulation sont planifiés. Le collégien vient lors des études ou lorsqu’un professeur est absent. La salle n’est pas un lieu d’isolement. Ce n’est pas parce qu’un élève a des troubles du comportement à un moment donné qu’il doit y venir. Cette salle ne doit pas être identifiée comme telle, ni par les élèves ni par les professeurs. A ce jour, nous n’avons pas eu à l’utiliser comme zone de repli.
Notre travail repose autour d’objectifs fixés préalablement par les Projets Personnalisés de Scolarisation (PPS). Ces projets sont élaborés en concertation avec les familles, les enseignants et les élèves eux mêmes. Le temps passé en salle d’autorégulation peut servir à des évaluations fonctionnelles ou comportementales qui permettront de revoir en cours d’année les objectifs du PPS et de mesurer les progrès réalisés.
Doriane JACQUET (ergothérapeute)
“Grâce à la pédagogie explicite, nous mettons l’accent sur l’apprentissage par la pratique. Nous travaillons beaucoup les fonctions exécutives afin que les élèves soient capables d’agir de façon organisée pour répondre aux demandes qui leurs sont faites. Cela passe par la planification des tâches, la mise en place de séquentiels ou l’utilisation de supports permettant d’améliorer la simple communication orale de consignes. Nos supports peuvent être repris en classe de référence et utilisés par la communauté éducative. Nous n’intervenons pas directement dans la pédagogie de la classe mais ce qui est développé au sein du DAR peut être diffusé à l’ensemble du collège.
Pour donner un exemple, les élèves du DAR peuvent avoir des compétences sociales assez limitées. Pourtant celles-ci sont très sollicitées à l’adolescence dans un lieu fort de socialisation comme le collège. Ils ont donc un réel besoin d’apprentissage dans ce domaine. Nous avons donc créé des groupes d’habiletés sociales que nous avons progressivement ouvert aux autres élèves du collège. Il s’est avéré que les élèves les plus en difficulté n’étaient pas toujours ceux du DAR. Ces compétences ayant été travaillées en amont, ils ont pu à certains moments être des éléments moteurs et porteurs de solutions pour l’ensemble du groupe”.
Aude MAZAUD (éducatrice spécialisée)
Orientations et perspectives
La mise place de ce dispositif et de cette salle d’autorégulation correspondent aux besoins et aux profils de certains enfants. Le DAR ne peut convenir à tous les élèves. Il est un élément complémentaire aux autres dans la diversité de l’offre de scolarisation. Dès l’école primaire, il demande un important travail de repérage et d’orientation de la part des équipes éducatives en concertation avec les familles. L’orientation est proposée par l’enseignant référent. Elle fait l’objet d’une notification de la part de la MDPH. Les choix qui dictent ce parcours s’appuient sur des évaluations et l’acquisition de compétences dans différents domaines : cognition, langage, motricité, attention… Des compétences et des niveaux qui peuvent s’avérer être extrêmement hétérogènes dans le trouble du spectre de l’autisme.
“Nous avons eu des retours de la part de parents et de professionnels qui ne comprenaient pas pourquoi certains élèves n’étaient pas dans le dispositif ? Ou pourquoi d’autres ne bénéficiaient que du “simple” soutien d’un(e) AESH ? Nous devons réexpliquer les critères d’orientation, le travail réalisé et tenir compte du nombre de professionnels et de places limitées dont nous disposons. Nous devons aussi prendre en considération la question des transports et la fatigabilité occasionnée en raison du lieu de résidence de l’élève”.
Amandine ORIOL (coordinatrice du pôle d’appui médico-sociale pour la scolarisation).
“Nos premiers retours sont très positifs. Les familles nous ont dit voir la différence. Elles ont noté de réels progrès dans les compétences de leur enfant. Les ressentis se font jusqu’à leur domicile et dans les activités quotidiennes, même celles en dehors du cadre scolaire”.
Aude MAZAUD (éducatrice spécialisée)
“Ce qui est extrêmement encourageant c’est que nous notons une amélioration générale de l’ensemble des élèves et pas uniquement ceux du DAR“.
Doriane JACQUET (ergothérapeute)
Ce volonté d’intégrer le dispositif d’autorégulation dans le projet d’établissement, de former la communauté éducative, de rapprocher les services de l’école et du médico-social, de décloisonner les processus d’apprentissage témoignent de l’adaptation et de la volonté d’inclure tous les élèves en fonction de leur besoin de la part de l’APF France handicap avec son partenaire, le collège Maurice Genevoix de Couzeix.
Quelques ressources disponibles pour aller plus loin
ALIN Christian. Un dispositif d’autorégulation pour les enfants TSA, le DAR : des textes au terrain… In La lettre d’autisme France 91 (août 2022). p. 14-19. Disponible au centre de documentation du CRA Limousin. : https://cra-limousin.centredoc.fr/index.php?lvl=notice_display&id=3468 (consulté le 21/09/2023).
Ministère des Solidarités et des familles. Les dispositifs d’autorégulation [en ligne]. 2022. Disponible sur : https://handicap.gouv.fr/les-dispositifs-dautoregulation (consulté le 21/09/2023).
Ministère des Solidarités et des familles. Autisme et TND : tout savoir sur la rentrée ![en ligne]. 2023. Disponible sur : https://handicap.gouv.fr/autisme-et-tnd-tout-savoir-sur-la-rentree (consulté le 21/09/2023).
PEP 87. Entretien sur l’autorégulation avec le Dr. Stéphane BEAULNE [en ligne]. 2021 (vidéo 6.35 minutes). Disponible sur : https://www.youtube.com/watch?v=8x5dx4W1YOs (consulté le 21/09/2023).
Ressources Ecole Inclusive. Posters : le dispositif d’AutoRégulation (DAR) [en ligne]. 2021. Disponible sur : https://ressources-ecole-inclusive.org/posters-le-dispositif-dautoregulation-dar/ (consulté le 21/09/2023).
Rédigé par Nicolas Roumiguières - Documentaliste au CRA Limousin